ABBATH, donc. « Dread Reaver » : son troisième album sous son seul pseudonyme, faisant suite à « Abbath » (2016) et « Outstrider » (2019). Pour les impétrants, ABBATH occupa à peu près tous les postes au sein du groupe mythique de Black Metal norvégien IMMORTAL : guitare, basse, vocaux, sans compter un personnage scénique haut en couleurs. De groupe essentiel dans la mouvance du Black Metal norvégien du début des années 90, IMMORTAL rencontra un public sensiblement plus important, avec la triplette d’albums plus abordables : « At The Heart Of Winter » (1999), « Damned In Black » (2000) et « Sons Of Northern Darkness » (2002).
Pas facile de se hisser à la hauteur d’un passé glorieux, surtout quand on collectionne les frasques pas glorieuses ; une simple recherche sur YouTube suffit à constater les dégâts : interview impossible pour cause de taux d’alcoolémie trop élevé, concert naufragé à Buenos Aires (pour la même raison ?), chute ridicule en dévalant une pente herbue au festival slovène Metaldays de 2017… Très clairement, le maintien de la crédibilité artistique de ce personnage haut en couleurs ne va pas de soi. D’où l’importance de cet album…
Très clairement, le compositeur ABBATH a ici misé sur l’efficacité et sur la simplicité, avec des compositions de trois-quatre minutes, ramassées, aux structures simples, avant tout basées sur l’impact rythmique. Objectif confirmé par une interprétation basée sur la brutalité, sur le refus de toute sophistication, sur l’âpreté des riffs et des vocaux, le tout appuyé par une section rythmique carrée, aussi puissante dans les passages rapides que dans les séquences plus lourdes. En dépit de quelques passages vocaux franchement dégueulés, on doit admettre que tout ce petit monde met du cœur à l’ouvrage et dépote sévère.
Le hic, c’est qu’on a du mal à distinguer des éléments marquants, sans même parler de compositions notables. Il s’agit davantage d’un exercice de style furieux, sincère, brutalement efficace, mais relativement peu inspiré. J’en veux pour preuve que le seul titre qui a immédiatement retenu mon attention est « Trapped Under Ice », rythmiquement accrocheur, qui plus est pourvu de repères mélodiques sommaires mais entêtants. Un bon point à créditer à METALLICA, le morceau originel figurant bien entendu sur « Ride The Lightning » (1984).
Comprenez-moi bien : il n’y a rien de honteux sur cet album… seulement il n’y a rien de franchement mémorable. De fait, « Dread Reaver » s’inscrit en retrait de ses deux prédécesseurs… sans même parler d’IMMORTAL ! Efficace, c’est déjà bien, même si c’est peu inspiré.
Alain Lavanne
Date de sortie: 25/03/2022
Label: Season of Mist
Style: Black Métal
Note: 14/20
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