Kaosguards

ABYSSKVLT “Phur Y. Yang” (Russie)

DIGI.cdr

Formé en 2014 dans la ville russe de Samara, ABYSSKVLT observe depuis un rythme discographique régulier de trois ans ; après l’inaugural « Thanatochromia » en 2015 et « Khaogenesis » en 2018, advient maintenant « Phur Y. Yang ». Aussi régulier que fidèle à son projet originel, le quartette continue obstinément à se donner corps et âmes au Funeral Doom, sous-genre dont il respecte minutieusement les préceptes de base. Les preuves…

En premier lieu, l’album contient quatre compositions, dont les durées témoignent d’une appétence coupable pour le gigantisme, puisqu’elles excèdent, par ordre de grandeur, 16, 18, 19 et même 26 minutes ! Là où un groupe à tendance progressive mettrait à profit ces immensités pour multiplier les breaks et les contrastes, ABYSSKVLT se fait fort de marquer inexorablement un tempo lent, d’asséner aussi sèchement que pesamment des rythmiques basiques et telluriques (riffs massifs, batterie métronomique et désincarnée), dont l’austérité granitique se trouve moins contredite que renforcée par les tout aussi classiques inserts de guitares solo simples, aux mélodies tant fantomatiques que mélancoliques. Les vocaux se conforment majoritairement aux canons de la gutturalité caverneuse et inarticulée.

Si l’on en restait là, « Phur Y. Yang » serait juste un énième album de Funeral Doom compétent et appliqué. Fort heureusement, ABYSSKVLT injecte dans cet univers fondamentalement désolé suffisamment d’éléments hétérodoxes pour insuffler un particularisme salvateur. Au niveau vocal, on note des variations plus aigres qui apportent une touche Black Metal, ainsi que des passages chuchotés ou parlés (dont des voix d’enfants) et des vocalises religieuses d’obédience tibétaine. Car les paroles de cet album sont écrites en tibétain et en shangshung, témoignant ainsi d’un attachement à la spiritualité ancestrale du Tibet. D’où une multiplication des plages à tendance ritualiste.
Evoquons également les arrangements de claviers et les bruitages divers qui instillent une atmosphère ambient non négligeable.

Au bout du compte, nous tenons un album à la fois solide sur les basiques et habité par une dimension supplémentaire indéniable. Si le groupe se risquait à donner à celle-ci davantage de place, sans rien renier aux fondamentaux Funeral Doom, sûrement constaterait-on un résultat encore plus transcendant. A surveiller de près.

Alain Lavanne

Date de sortie: 14/05/2021

Label: Solitude Productions

Style: Funeral Doom Métal

Note: 16/20

Ecoutez ici

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Les derniers articles

catafalque2023
Chroniques

CATAFALQUE “Dybbuk” (Royaume-Uni)

« Dybbuk » constitue la troisième pierre levée dans la discographie générée par le quartette britannique CATAFALQUE ; il fait suite à un premier album sans titre (2019),

Lire plus»
rorcal2023
Chroniques

RORCAL “Silence” (Suisse)

Il y a certainement un humour suisse qui m’échappe totalement. Notamment celui qui consiste à intituler « Silence » un objet aussi brutal, lourd, agressif que ce

Lire plus»
INVULTATON2023
Chroniques

INVULTATION “Feral Legion” (Etats-Unis)

Après deux albums, hélas trop confidentiellement exposés (« Wolfstrap » en 2020 et « Unconquerable Death » en 2021), INVULTATION obtient aujourd’hui un net surcroît d’exposition (underground, mais tout

Lire plus»